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Van Dongen mis à l’honneur au Musée d’Art Moderne parisien : incontournable !

Une rétrospective haute en couleurs à redécouvrir absolument jusqu’au 17 juillet 2011 ! Intitulée Fauve, Anarchiste et mondain, elle met à jour le parcours atypique et l’ascension vertigineuse du peintre le plus parisien des hollandais…

Musée d'Art Moderne de Paris

Musée d'Art Moderne de Paris

 

Le Musée français reprend et complète, depuis le 25 mars 2011, l’exposition All Eyes on Kees Van Dongen, organisée au Musée Boijmans Van Beuningen de Rotterdam du 18 septembre 2010 au 23 janvier 2011. Ce sont la vingtaine d’oeuvres déjà en sa possession qui marqua le point de départ de cet hommage à l’artiste hollandais : Kees Van Dongen (1877-1968).

 

 

Chimère Pie

Chimère Pie

L’exposition s’ouvre sur un tableau résolument évocateur, La Chimère Pie si chère à l’artiste, exécutée lors de sa 18ème année et qu’il conserva toute sa vie. Elle est centrée plus précisément sur la période parisienne de l’artiste qui foule pour la première fois les pavés de la capitale en 1897 pour s’y installer définitivement deux ans plus tard.

90 peintures, dessins et céramiques y sont réunis en un parcours simple jalonné de très belles œuvres connues et plus méconnues du grand public. La période choisie s’échelonne de 1985 à 1831, considérée comme la plus florissante pour l’artiste, marquée, à son apogée par  la reconnaissance du milieu dans les années 20. Sa succession de postures artistiques trouvera alors écho en 3 termes forts qui figurent en titre de la rétrospective : Fauve, Anarchiste et mondain.

 

1 – Fauve

Marchandes d'herbes et d'amour

Marchandes d'herbes et d'amour (1913)

 

Van Dongen est avant tout le peintre de la Couleur, crue & sans concession. Ainsi, suivant les pas de ses contemporains,  Derain et Matisse, il ose les alliances colorées improbables découlant du courant fauviste en vogue. Toutefois, il est important de noter qu’il se dissocie profondément du paysagisme par ses thématiques de scènes urbaines ou de corps humains. Mais, au début des années 1910, alors que Paris demeure son sujet de prédilection, l’exposition offre aussi un aperçu de l’Orient que Van Dongen, n’hésite pas à redéfinir , au cours de ses voyages au Maroc, en Espagne ou encore en Egypte.

 

 

 

Les Lutteuses

Les Lutteuses (1907-1908)

L’artiste reste viscéralement indépendant dans son comportement et ses choix : il puise dans les mouvances de son époque les éléments susceptibles de servir son Art, sans jamais véritablement avoir d’appartenance à un groupe. C’est pourquoi, au fil des sections de l’exposition et au gré des toiles,  il est aisé pour le regardeur d’identifier les divers courants artistiques dont il était imprégné lors certaines réalisations : au tournant du siècle résident  à Montmartre et Montparnasse, il offre une vision du Sacré Cœur sous un ciel  impressionniste ou encore des paysages à la facture pointilliste, puis c’est là, à partir de 1905, au contact de ses fréquentations au sein du célèbre Bateau Lavoir (Derain, Vlaminck, Picasso…), que son style change. Ses figures se voient dorénavant soulignées d’un trait bleu ou rouge tandis que la chair éclate dans des teintes jaune, vert et rose. Il se définira alors comme un « nègre blanc » se rapprochant d’un style plus primitiviste. Pour Sophie Krebs co-commissaire de l’exposition, « ses Lutteuses, groupe de femmes au formes généreuses moulées dans des maillots roses, font écho aux Demoiselles d’Avignon de Picasso ».

La lumière que le peintre choisit de transcrire dans ses œuvres est dès lors une lumière artificielle, franche, qui illumine ses sujets jusqu’à les inonder de couleurs (cf. Modjesko, Chanteur Soprano datant de 1908). L’emploi de la couleur pure, détachée de tout souci de représentation de la réalité est ainsi mise au service de l’expressivité. La touche en est large, laissant transparaitre toute l’impulsivité du peintre.

Modjesko Chanteur Soprano

Modjesko Chanteur Soprano (1908)

Tandis que le portait intellectualisait la femme, Van Dongen offre une vision plus animale, érotisée  et parfois ironisée de la gente féminine de son époque : Audace et instinctivité restent les maîtres mots de sa pratique artistique, le positionnant irrémédiablement comme un avant-gardiste.

 

2 – Anarchiste

Artiste incontestablement singulier, bohème dans ses débuts (il vit en roulotte de 1901 à 1906),  Kees Van Dongen est un personnage aux multiples facettes : familier du genre caricatural et de la dénonciation sociale  sans oublier bien sûr avant-gardiste fauve, il sera qualifié d’anarchiste pour son engagement social, politique ainsi que ses choix plastiques osés issus d’une même verve. Louis Chaumeil soulignera si justement combien la personnalité du peintre fut « dominée par la passion de vivre et la passion de peindre dans l’impulsion sensuelle de l’instinct ».

Né d’une famille de la petite bourgeoisie, le jeune homme fréquentera, au cours de ses études artistiques, les cercles anarchistes et symbolistes. Fasciné très vite par la vie parisienne, il multipliera les allers retours entre sa ville natale (Rotterdam) et la capitale française avant d’y établir définitivement son terrain artistique. Porté par son caractère rebelle et indépendant, il peint aussi bien des personnages de cirque sans contournement, des femmes nues dans des positions lascives, que des danseuses sensuelles sans édulcorant, frôlant la provocation.

Ainsi, il n’hésite pas à faire se côtoyer érotisme & ironie envers son modèle… Ses œuvres sont brutes et explosives comme en témoigne le Portrait de Fernande Olivier (compagne de Picasso, son voisin d’atelier au Bateau Lavoir). L’artiste se qualifiera d’ailleurs lui-même de « peintre du Tout Paris, le peintre des névroses élégantes ».

Fernande

Portrait de Fernande Olivier (1905)

Le Vieux Clown

Le Vieux Clown (1906-1907)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Deux sections de l’exposition sont également consacrées à son travail graphique qu’il utilise aux prémices de sa carrière en tant qu’expression de ses propres idées politiques et sociales. C’est la découverte, en 1897, de l‘impact engendré par le quotidien Gil Blas , qui le conduit à emprunter cette voie.  Il croquera ainsi dans une atmosphère nocturne et dépravée, des scènes alliant marins et prostituées dans les quartiers sulfureux de Rotterdam.

Or, dans les années 1920, les illustrations de revues satiriques (Revue Blanche, L’assiette au Beurre…) laisseront place sous formes d’affiches de stars de l’époque, à son côté désormais mondain …

 

3 – Mondain

Le Sphinx

Le Sphinx (1925)

Paris est une figure incontournable de réussite pour les artistes et Van Dongen connaît alors (à partir de 1920) une notoriété grandissante qui l’amène à vivre dans les beaux quartiers de la capitale.

L’époque se veut à la fête et aux soirées mondaines : le peintre les fréquente assidument devenant le portraitiste de son temps. Ce Paris des années folles le conduira alors dans ce qu’il définira comme « sa période cocktail » : hommes et femmes de lettres, de la mode, stars du cinéma et de la scène se voient théâtralisées dans des costumes et accessoires. Les poses sont souvent outrées et hautaines mettant en relief le faste et l’inconsistance de personnages qui n’existent qu’au travers de cette possession matérielle.

« La peinture, écrira l’artiste, est le mensonge le plus beau. La peinture est un vice, je ne peux pas faire autre chose. »

 

Son goût pour les bals masqués, qu’il organise au sein même de son atelier, l’amène même jusqu’à se portraiturer en un Neptune sculptural dénué de la moindre expression, en contraste total avec toute ambiance festive. Un autoportrait datant de 1922 dont l’antithèse avec celui réalisé en ombre chinoise en 1895 ne peut que frapper le spectateur !

Autoportrait en Bleu (1895)

Autoportrait en Bleu (1895)

Autoportrait en Neptune (1922)

Autoportrait en Neptune (1922)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans la dernière salle de l’exposition, les portraits campés au profit de riches particuliers y trônent en maîtres, idéalisés et sveltes. Ils révèlent  une peinture quasi « Warholienne » dans laquelle le médium peut être désormais perçu comme outil social. L’artiste s’exclamera à ce propos : « La règle essentielle c’est d’allonger les femmes et surtout de les amincir. Après cela, il ne reste plus qu’à grossier leurs bijoux. Et elles sont ravies ».

Portrait de Madame Maria Ricotti dans L'Enjôleuse (1921)

Portrait de Madame Maria Ricotti dans L'Enjôleuse (1921)

 

 

Audace, provocation, singularité constituent donc le mélange détonant qui a permis à Kees Van Dongen, peintre hollandais (devenu français sur sa demande en 1929), d’accéder  à son rêve de réussite parisienne finement orchestré au gré de ses rencontres artistiques et mondaines. Il participera ainsi de façon notable à la diffusion du fauvisme à l’étranger  (Hollande, Allemagne, Russie). Son originalité et sa grande liberté d’expression en font un peintre aux toiles vibrantes et brutes, ancré dans son temps et y participant pleinement.

L’exposition, au fil des sections, met donc à jour l’ascension sociale et artistique d’un artiste authentique, indépendant, singulier dans ses orientations qui a su rebondir face aux tendances de son époque. Le mythe de l’artiste solitaire et maudit semble alors bien loin…

Une rétrospective qui s’avère donc très intéressante, surprenante et parfois insolite où la femme de tous milieux, d’Orient ou d’occident,  y arbore une empreinte séductrice et prépondérante : visages aux yeux cernés de khôl, lourdes chevelures, robes légères, châles brodés, kimonos fleuris… Pour Van Dongen, « la femme est, sans équivoque,  le paysage le plus beau ». Le Musée D’Art Moderne de Paris abrite de ce fait une exposition au sein de laquelle se conjuguent Amour des femmes & Amour de l’Art. Bref, Osez- vous y rendre et faîte la découverte avec un artiste pour lequel le mot Passion prend subitement tout son sens !

Affiche Rétrospective Van Dongen

Affiche Rétrospective Van Dongen

 

 

 

L’exposition se déroule au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, 11 avenue de président Wilson (75016 Paris).

Métro 9 Alma-Marceau ou Iena.

Le Musée est ouvert tous les jours (sauf le lundi) de 10h à 18h et jusqu’à 22h le jeudi.

Le tarif plein est de 10 € et 7,5 € en tarif réduit.

 

 

 

 

 

 

Florence Alfano


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